Décès d’un pompier du Service de sécurité incendie de Montréal lors d’une intervention de sauvetage nautique : la CNESST dévoile les conclusions de son enquête
La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) rend aujourd’hui publiques les conclusions de son enquête sur l’accident du travail ayant coûté la vie, le 17 octobre 2021, à un pompier du Service de sécurité incendie de Montréal (SIM), lors d’une intervention de sauvetage nautique dans les rapides de Lachine.
Chronologie de l’accident
Le jour de l’accident, le pompier se trouvait dans l’embarcation 1864 afin d’exécuter une opération de sauvetage pour deux plaisanciers dont le bateau à la dérive se dirigeait vers les rapides de Lachine. Après avoir rejoint le bateau des plaisanciers, lui et trois de ses collègues ont effectué des manœuvres afin de préparer le remorquage. C’est à ce moment que l’embarcation des pompiers s’est retrouvée dans un creux de vague où l’eau s’est engouffrée à l’intérieur, ce qui a mené à son renversement. Les quatre pompiers se sont retrouvés à l’eau. Alors que ses trois collègues ont été repêchés, le pompier a été localisé sous l’embarcation à la suite des recherches. Les services d’Urgences-santé ont été appelés sur les lieux et l’ont ensuite transporté à l’hôpital où son décès par noyade a été confirmé.
Causes de l’accident
L’enquête a permis à la CNESST de retenir trois causes pour expliquer l’accident :
- Lors de la manœuvre d’approche de l’embarcation de sauvetage des pompiers pour s’arrimer à l’embarcation à la dérive dans les rapides de Lachine, la combinaison de la répartition du poids des pompiers dans leur embarcation, du déplacement de l’eau qui s’y engouffrait et de son positionnement dans le creux de vague a entraîné son renversement.
- Les pompiers sont intervenus sur la base d’informations incomplètes lors d’un sauvetage dans un secteur des rapides de Lachine qui allait au-delà des limites de navigabilité de leur embarcation.
- La formation déficiente de l’équipage du 1864 et des intervenants du poste de commandement riverain a exposé les travailleurs à un danger de noyade lors d’une intervention de sauvetage dans une zone non balisée des rapides de Lachine.
À la suite de l’accident, la CNESST a interdit au SIM toute navigation dans la zone non balisée des rapides de Lachine, jusqu’à ce que les mesures soient mises en place pour assurer une navigation sécuritaire. Depuis, l’employeur travaille à l’implantation de mesures préventives.
Comment éviter un tel accident
Pour prévenir les accidents sur un plan d’eau lors d’un sauvetage nautique effectué à l’aide d’une embarcation, des solutions existent, notamment :
- identifier et analyser les risques liés au sauvetage nautique avec embarcation lors de la planification de l’intervention et lors des exercices pratiques;
- s’assurer que les travailleuses et travailleurs possèdent les moyens et les informations nécessaires leur permettant de valider les conditions de navigabilité et les limites de leur embarcation afin qu’elles soient respectées en permanence;
- s’assurer que les travailleurs possèdent une formation théorique et pratique structurée en sauvetage nautique, qui leur permet de maintenir leurs compétences à jour pour ne pas mettre leur propre sécurité ni celle de leurs collègues en jeu. Deux normes de la National Fire Protection Association (association nationale de la protection incendie) sont considérées comme étant des règles de l’art en ce qui concerne les compétences requises et la formation en sauvetage nautique (NFPA1670 : Standard on Operations and Training for Technical Search and Rescue Incidents et NFPA1006 : Standard for Technical Rescue Personnel Professional Qualifications).
En vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique et psychique de ses travailleurs. Il a également l’obligation de s’assurer que l’organisation du travail ainsi que les équipements, les méthodes et les techniques pour l’accomplir sont sécuritaires.
Les travailleurs et travailleuses doivent faire équipe avec l’employeur pour repérer les dangers et mettre en place les moyens pour les éliminer ou les contrôler.
Suivis de l’enquête
Pour éviter qu’un accident similaire se reproduise, la CNESST informera des conclusions de l’enquête l’Association des gestionnaires en sécurité incendie et civile du Québec, l’Union des municipalités du Québec, la Fédération québécoise des municipalités, le Regroupement des associations de pompiers du Québec ainsi que le Syndicat des pompiers du Québec afin que leurs membres en soient informés.
De plus, le rapport d’enquête sera diffusé dans les établissements de formation permettant d’obtenir la qualification professionnelle de pompier, soit l’École nationale des pompiers du Québec et l’Institut de protection contre les incendies du Québec, ainsi que dans les établissements collégiaux offrant des programmes en lien avec la lutte contre les incendies, afin de sensibiliser les futurs travailleurs et travailleuses.
Le rapport d’enquête sera également distribué à l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail, secteur Affaires municipales.
La CNESST a signifié à l’employeur, la Ville de Montréal, un constat d’infraction en vertu de l'article 237 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST). Pour ce type d’infractions, le montant de l’amende varie de 17 680 $ à 70 727 $ pour une première offense, et de 35 364 $ à 176 819 $ en cas de récidive.
Finalement, la CNESST a recommandé au ministère de la Sécurité publique de mettre en place un groupe de travail chargé de déterminer les différentes mesures et les bonnes pratiques permettant d’améliorer la santé et la sécurité des divers intervenants, dont les pompiers et pompières et le corps policier, lors des interventions de sauvetage nautique.