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La Loi sur les normes du travail Chapitre V - Les recours (Art. 98 à 135)

Chapitre V - Les recours (Art. 98 à 135)

Section III - Recours à l'encontre d'un congédiement fait sans une cause juste et suffisante (Art. 124 à 135)

Article 124

Plainte de congédiement

La personne salariée qui justifie de deux ans de service continu dans une même entreprise et qui croit avoir été congédiée sans une cause juste et suffisante peut soumettre sa plainte par écrit à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail ou la mettre à la poste à l’adresse de la Commission dans les 45 jours de son congédiement, sauf si une procédure de réparation, autre que le recours en dommages-intérêts, est prévue ailleurs dans la présente loi, dans une autre loi ou dans une convention.

Défaut

Si la plainte est soumise dans ce délai au Tribunal administratif du travail, le défaut de l’avoir soumise à la Commission ne peut être opposé au plaignant.

1979, c. 45, a. 124; 1990, c. 73, a. 59; 2001, c. 26, a. 142; 2002, c. 80, a. 69; 2015, c. 15, a. 237; 2022, c. 22 a.178.

Interprétation

L’article 124 LNT prévoit un recours pour congédiement sans cause juste et suffisante. Ce recours constitue une mesure de protection à l’emploi s’apparentant au grief, dont bénéficient généralement les salariés régis par une convention collective. De plus, il renforce les règles relatives au contrat de travail prévues au Code civil, en prévoyant, lorsque cela est approprié, la possibilité de réintégration du salarié dans son travail.

Comme les autres normes prévues par la loi, l’article 124 LNT constitue également une norme du travail qui crée, pour un salarié qui compte deux ans de service continu un droit à l’emploi et le protège d’un congédiement effectué sans raison, ni justification. La cause juste et suffisante est celle qui est suffisamment sérieuse ou grave pour justifier le congédiement. L’employeur ne peut donc imposer une sanction disproportionnée par rapport à la faute reprochée. Il demeure essentiel d’évaluer l’ensemble des circonstances de chaque cas afin de déterminer le caractère juste et équitable de la mesure prise par l’employeur.

Conditions d'ouverture

C’est le plaignant qui doit démontrer, devant le Tribunal administratif du travail, les conditions d’ouverture au recours en vertu de l’article 124 LNT. L’employeur peut s’opposer à la recevabilité de la plainte qui ne satisferait pas aux conditions prévues par la loi. Par ailleurs, si ces conditions sont admises de la part de ce dernier, le plaignant n’aura généralement pas à en faire la preuve.

Les conditions d’ouverture au recours pour congédiement sans cause juste et suffisante sont énoncées à l’article 124 LNT.

  1. La notion de salarié

    Le plaignant doit être un salarié au sens de la Loi sur les normes du travail. Cependant, bien qu’il puisse se qualifier de salarié, ce recours ne lui est pas ouvert s’il est un cadre supérieur (voir l’interprétation du paragraphe 6° de l’article 3 LNT et celle de l’article 3.1 LNT à cet effet ainsi que l’interprétation de la définition de salarié au paragraphe 10° de l’article 1 LNT).

    De plus, le salarié doit être titulaire d’un contrat de travail, verbal ou écrit, auprès d’une entreprise de compétence provinciale. En effet, la loi ne s’applique pas aux entreprises de compétence fédérale, telles les banques ou les stations de radiodiffusion, lesquelles relèvent du Parlement fédéral. Le contrat de travail implique les éléments suivants : une prestation de travail par un salarié, une rémunération ainsi qu’un lien de subordination salarié-employeur.

  2. Le service continu

    Depuis le 1er mai 2003, pour bénéficier du recours à l’encontre d’un congédiement fait sans une cause juste et suffisante, le salarié doit justifier de deux ans de service continu. Le service continu s’attache à l’entreprise et non à la personne qui l’administre. Le calcul du service continu doit se faire en considérant la période d’emploi dans l’entreprise et non pour le même employeur. La Commission doit s’assurer que le plaignant respecte cette condition préalable lors de la réception de la plainte, sans quoi celle-ci ne pourrait être acheminée vers les autres étapes de traitement. Voir l’interprétation de la définition de service continu présentée au paragraphe 12° de l’article 1 LNT ainsi que celle donnée aux articles 96 et 97 LNT relativement à la notion d’entreprise et à l’impact d’une aliénation ou concession d’entreprise sur le service continu.

  3. Une terminaison d'emploi

    Le salarié doit également prouver qu’il y a eu une terminaison d’emploi (fin d’emploi). Il appartient à l’employeur de prouver une cause juste et suffisante de congédiement (voir la section « fardeau de preuve »). L’analyse des circonstances d’une fin d’emploi doit recevoir une interprétation large, pour couvrir toutes les formes de terminaison d’emploi. Par conséquent, tout acte de l’employeur mettant fin au lien d’emploi du salarié, peu importe sa qualification initiale (par exemple un licenciement, une démission ou une restructuration), peut être considéré comme un congédiement. Cette terminaison d’emploi peut découler de motifs disciplinaires, basés sur des considérations subjectives rattachées au salarié lui-même, ou être le résultat de considérations administratives, basées sur des facteurs liés à l’entreprise. On parle alors d’un licenciement. À titre d’exemple, une rupture du lien d’emploi causée par l’attitude négative du salarié au travail est de nature disciplinaire, tandis que celle liée à des difficultés économiques de l’entreprise est de nature administrative.

    Comme autres exemples de motifs disciplinaires souvent allégués, des absences et retards répétés, des fautes dans l’exécution du travail ou de l’insubordination pourraient être retenus. Sur le plan économique ou administratif, des changements technologiques ou une baisse des affaires en seraient des illustrations. Chacun des motifs devra être analysé en fonction des circonstances de chaque cas afin de déterminer s’il constitue une cause juste et suffisante de congédiement. Par ailleurs, lorsque l’employeur modifie de façon unilatérale et substantielle les conditions de travail d’un salarié, provoquant son départ sans le congédier directement, il est possible que son geste soit un congédiement déguisé. Dans un tel cas, il n’est pas exigé que l’employeur agisse de mauvaise foi ou intentionnellement. Il suffit que la situation objective entraîne la rupture du contrat de travail. Un congédiement déguisé peut se caractériser par des changements comme une diminution du nombre d’heures de travail, une baisse de salaire ou une rétrogradation dans un autre poste. Un non-rappel au travail à la suite d’une mise à pied peut également être considéré comme un congédiement déguisé.

    Mentionnons également qu’il n’est pas nécessaire que le salarié ait quitté son emploi pour conclure à un congédiement. Par exemple, le salarié qui accepterait une mutation ou une rétrogradation forcée conserverait son recours pour congédiement sans une cause juste et suffisante en vertu de l’article 124 LNT.

    L’article 124 LNT accorde donc au salarié qui croit que sa terminaison d’emploi équivaut à un congédiement sans une cause juste et suffisante le droit de soumettre une plainte à la Commission des normes du travail.

  4. Absence d'une autre procédure de réparation

    Une plainte en vertu de l’article 124 LNT ne peut être déposée « si une procédure de réparation, autre que le recours en dommages-intérêts, est prévue ailleurs dans la présente loi, dans une autre loi ou dans une convention ». L’existence d’une autre procédure de réparation est suffisante pour empêcher le recours à l’article 124 LNT, et ce, même si un salarié décide de ne pas l’exercer. Par contre, cette autre procédure de réparation doit être clairement établie et accessible au salarié au moment où ce dernier utilise le recours de l’article 124 LNT. De plus, elle doit pouvoir donner lieu aux mêmes remèdes que ceux prévus dans le cadre de celui-ci, incluant le pouvoir de se prononcer sur l’existence ou non d’un congédiement fait sans une cause juste et suffisante et d’ordonner la réintégration du salarié dans son emploi (voir l’interprétation de l’article 128 LNT concernant les pouvoirs du Tribunal administratif du travail à cet effet).

    De plus, la procédure de réparation doit avoir un caractère obligatoire. Ainsi, l’une des parties doit pouvoir obliger l’autre à s’y soumettre, elle doit respecter les principes de justice naturelle, notamment le droit d’être entendu par un tribunal indépendant et impartial, et la décision rendue dans le cadre de cette procédure doit être exécutoire. Relativement à la forme que doit prendre cette « autre procédure de réparation », les tribunaux ont établi sept principaux critères pour qualifier celle-ci d’équivalente au recours prévu par l’article 124 LNT. La procédure doit :

    • être constatée par écrit ;
    • être connue des parties ;
    • contenir les noms et qualités des parties ;
    • contenir la désignation des arbitres ou encore la procédure pour les nommer ;
    • contenir l’objet des litiges sujets à cette procédure ;
    • préciser le délai imposé à l’arbitre pour rendre sa décision ;
    • préciser la compétence et les pouvoirs de l’arbitre.

    À titre d’exemple, une procédure de grief en vertu d’une convention collective, lorsque celle-ci est au moins équivalente à celle prévue à l’article 124 LNT, a été assimilée à une autre procédure de réparation empêchant l’exercice du recours 124 LNT. Par ailleurs, un recours pour pratique interdite (voir l’interprétation des articles 122 LNT et suiv.) ne constitue pas une autre procédure de réparation au sens de l’article 124 LNT. Dans ce cas, les deux recours sont de nature différente, visant un but différent et donnant lieu à des décisions qui n’ont rien de semblable.

  5. Plainte déposée dans les 45 jours du congédiement

    Le délai pour porter plainte est de 45 jours. Ce délai est de rigueur. Toutefois, dans le cas d’une plainte déposée tardivement, les circonstances entourant le dépôt tardif devront être évaluées. En effet, il se peut que le plaignant ait été dans l’impossibilité d’agir plus tôt, ce motif constituant une cause d’interruption du délai de prescription au sens des articles 2904 et suivants du Code civil du Québec.

    Par ailleurs, une plainte mise à la poste à l’adresse de la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail à l’intérieur du délai de 45 jours est validement déposée même si la Commission l’a reçue après le délai de 45 jours. Le point de départ du délai pour déposer une plainte est la date où la cessation d’emploi est devenue effective, et non celle où le salarié en a été avisé. Cependant, dans le cas d’un congédiement déguisé, le délai commencera à courir soit au moment où le salarié prend connaissance des modifications et des effets à son contrat de travail, soit lors de son départ définitif de l’emploi (voir l’interprétation de l’article 123 LNT relativement à la computation des délais).

Fardeau de preuve

Lorsque le salarié établit les conditions d’ouverture du recours, il appartient à l’employeur de prouver une cause juste et suffisante de congédiement. La cause juste et suffisante est celle qui n’est pas un prétexte et qui est suffisamment sérieuse pour justifier un congédiement (voir ci-dessus). De plus, cette cause doit être licite. En ce sens, un employeur ne pourrait appuyer sa décision de congédier par une cause allant à l’encontre de principes fondamentaux, telle une discrimination fondée sur la Charte.

Lorsque la terminaison d’emploi s’appuie sur des motifs non disciplinaires et est causée par des raisons économiques ou administratives, on parle d’un licenciement. Par exemple, un salarié pourrait voir son poste aboli à la suite d’une baisse des affaires. En cette matière, l’employeur a le fardeau de prouver les difficultés économiques ou la cause de la réorganisation administrative. De plus, il devra démontrer que le choix du salarié à licencier est basé sur des raisons objectives, impartiales, et non inspirées d’éléments propres à l’employé ciblé. Dans ce cas, une telle décision serait une cause juste et suffisante. L’employeur ne peut donc utiliser le prétexte d’un licenciement pour se débarrasser d’un salarié qu’il juge indésirable.

Dans certaines circonstances, il peut s’avérer difficile de déterminer laquelle des deux parties (l’employeur ou le salarié) a mis fin au contrat de travail. La démission ne se présume pas. Elle est un acte qui appartient en propre au salarié. Si l’employeur invoque la démission lors d’un recours pour congédiement, il a le fardeau de prouver que le salarié a démissionné. Dans ces circonstances, le Tribunal administratif du travail possède le pouvoir d’analyser l’ensemble des faits entourant la démission afin de déterminer sa validité. Une démission forcée est assimilée à un congédiement déguisé (voir à l’article 82.1 LNT l’interprétation relative à la démission).

Dans tous les cas, l’employeur doit établir par une preuve prépondérante les faits qui soutiennent ses prétentions. La preuve prépondérante se définit comme celle qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence. Il est à remarquer que le salarié ne bénéficie pas, lors d’un recours en vertu de l’article 124 LNT, de la présomption qui existe en sa faveur lors d’un recours en vertu des articles 122 et 122.1 LNT (voir l’interprétation de l’article 127 LNT).

Gradation des sanctions

Dans le cadre du recours 124 LNT, un employeur doit imposer les mesures disciplinaires de façon graduelle, c’est-à-dire selon la gravité et la fréquence des reproches adressés au salarié. La mesure extrême qu’est le congédiement ne doit être imposée au salarié que lorsque les autres solutions ont été épuisées, que ce dernier a été avisé de ce qu’on lui reproche et qu’il a eu le temps raisonnable pour corriger son comportement. Il va de soi que la progression des sanctions ne s’applique pas si le salarié a commis une faute grave (voir l’interprétation donnée à l’article 82.1 LNT relativement à cette notion).

Jurisprudence

A. Congédiement – définition

Congédiement vs licenciement

Léveillée c. Murs secs Jalap inc., D.T.E. 93T-816 (C.A.)
Donohue inc. c. Simard, [1988] R.J.Q. 2118 (C.A.)

Dans le cas d’un congédiement, l’employeur a toujours besoin des services que lui fournissait l’employé, mais il ne désire plus que ces services soient rendus par l’employé qu’il congédie. À l’opposé, dans le cas d’un licenciement, l’employeur n’a plus besoin des services que lui rendait l’employé licencié, mais il n’a rien à reprocher à cet employé. En l’espèce, la Cour considère qu’il ne peut s’agir d’un licenciement, puisque l’employeur embauche un nouvel employé à temps partiel à la suite du départ de la plaignante.

Rupture du lien d'emploi

Joyal c. Hôpital du Christ-Roi, [1997] R.J.Q. 38 (C.A.)
Farber c. Compagnie Trust Royal, [1997] 1 R.C.S. 846

Il n’est pas nécessaire qu’il y ait rupture complète du lien d’emploi ou démission du salarié pour que s’ouvre le recours contre un congédiement fait sans cause juste et suffisante. Lorsque l’employeur modifie unilatéralement et de façon substantielle les conditions essentielles du contrat de travail, il cesse de respecter ses obligations, ce qui équivaut à un bris du contrat, donc à un congédiement.

Mise à pied / non-rappel du travail

Lamy c. Kraft ltée, D.T.E. 91T-49 (C.A.)

Une mise à pied, qui devient permanente lorsque tous les salariés sont rappelés au travail à l’exception du plaignant, constitue un congédiement.

Ranger c. Le Bureau d’expertise des assureurs ltée, [2001] R.J.D.T. 1911 (C.T.)

Une mise à pied temporaire devient un congédiement lorsqu’elle entraîne une modification substantielle des conditions de travail par son effet déterminant sur le salaire et sur le régime de retraite du salarié et qu’elle est utilisée comme un prétexte pour se débarrasser de cet employé.

Thibeault c. Société touristique de L’Anse-à-la-Croix, [2004] R.J.D.T. 233 (C.R.T.)

Le terme congédiement possède un sens très large et doit recevoir une interprétation large et libérale pour couvrir toutes les formes de terminaison d’emploi. Le non-rappel au travail du plaignant constitue un congédiement. Le plaignant se retrouve sans emploi et sans rémunération, ce qui suffit pour qu’il puisse exercer le présent recours.

Contrat à durée déterminée

Moore c. Compagnie Montréal Trust, [1988] R.J.Q. 2339 (C.A.)

Le non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée peut, dans certaines circonstances, constituer un congédiement lorsque l’employé est en droit de s’attendre à ce que le contrat soit renouvelé. Puisque nous sommes en présence d’une loi d’ordre public, l’employeur ne peut se retrancher derrière une clause de non-renouvellement pour éviter d’avoir à démontrer une cause juste et suffisante de congédiement.

D’Andréa c. Commission scolaire de Laval, D.T.E. 2001T-1176 (C.T.)

Mettre fin à l’emploi d’une salariée au terme d’un contrat à durée déterminée constitue un congédiement lorsqu’il y a attente de renouvellement. En l’espèce, le contrat de la salariée a été renouvelé pendant sept ans. L’interruption entre les contrats est sans importance, puisqu’elle coïncide avec l’année scolaire et tient à la nature du travail. La salariée pouvait donc raisonnablement espérer obtenir un nouveau contrat.

Congrégation Beth-El c. Commission des relations du travail, D.T.E. 2004T-135 (C.S.). Appel principal accueilli et appel incident rejeté, D.T.E. 2005T-365 (C.A.)

Le non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée constitue un congédiement lorsque la conduite des parties, ici l’existence de négociations en vue du renouvellement du contrat, permet de croire que le contrat sera prolongé.

  1. Licenciement

Fardeau de preuve

Flieger c. Nouveau-Brunswick, [1993] 2 R.C.S. 651

La Cour suprême, analysant les termes « fonction » et « poste », établit qu’il s’agit de l’ensemble des responsabilités, des tâches et des activités dont s’acquitte un employé en particulier ou un groupe donné d’employés. Il y a donc abolition de poste lorsque cet ensemble d’activités, qui constitue le poste, n’est plus exécuté à la suite d’une décision de bonne foi de l’employeur. Si l’ensemble des activités est intégralement confié à un autre employé ou reçoit simplement une appellation différente, il n’y a pas abolition du poste.

Girard c. Centre du camion Nutrinor inc., D.T.E. 2004T-693 (C.R.T.)

Dans le cadre d’un licenciement, il n’est pas suffisant d’établir les difficultés économiques. L’employeur a aussi l’obligation de prouver que son geste n’est pas un prétexte. En l’espèce, l’employeur a profité de la mauvaise situation financière de l’entreprise pour se débarrasser du plaignant en raison d’un conflit de personnalité.

Joly c. Gestion Gertec ltée, D.T.E. 99T-190 (C.T.). Requête en évocation rayée, (C.S., 1998-12-16) 500-05-045889-985

Lorsqu’un employeur justifie un licenciement par des motifs économiques, il doit faire la démonstration de la baisse du chiffre d’affaires par une preuve prépondérante et convaincante, de même que celle du lien entre cette baisse et la rupture du lien d’emploi. Une simple preuve générale de difficultés économiques n’est pas suffisante.

Clark c. Groupe D.M.R. inc., D.T.E. 97T-625 (C.T.)

En matière de licenciement, l’employeur a d’abord l’obligation d’établir l’opportunité de la réorganisation. Il a aussi l’obligation de démontrer que le poste de la personne licenciée est aboli, qu’il n’existe plus tel quel ou qu’il a fallu faire un choix entre les employés pour déterminer lesquels seraient gardés en emploi. Les critères utilisés pour faire ce choix doivent être sérieux. Il faut par ailleurs établir l’existence de ces critères et leur application dans les faits.

Pomerleau c. Conseil de bande Kitcisakik (Québec), [2002] R.J.D.T. 1233 (T.A.)

 Dans le cadre d’une réorganisation administrative, la plaignante postule un emploi de niveau plus élevé, mais elle ne l’obtient pas. Il est mis fin à son emploi, sous prétexte de l’abolition de son poste. Une nouvelle employée est embauchée pour remplir les fonctions qu’exerçait la plaignante, mais le poste est désigné différemment. Le rejet de la candidature de la plaignante ne peut avoir pour effet d’évincer celle-ci du poste qu’elle occupait et qui possède maintenant une nouvelle désignation. Le congédiement est injustifié.

Rocco c. Auto Hamer (1979) ltée, D.T.E. 93T-1101 (C.T.)

Lorsque la décision de l’employeur de congédier un salarié repose uniquement sur des motifs économiques en vue de rentabiliser l’entreprise, que cette décision est raisonnable et qu’elle est exempte de discrimination, de caprice ou d’émotivité, il s’agit d’un licenciement.

Bousquet c. Desjardins, D.T.E. 97T-1375 (C.A.)

Le Commissaire du travail a compétence pour décider si la fin d’emploi constitue un licenciement ou un congédiement déguisé. À cet effet, il peut se pencher sur les critères de sélection afin de déterminer si le choix du salarié à licencier s’est fait de manière objective.

Abolition de poste : justification

Messagerie de presse Benjamin inc. c. Bureau du commissaire général du travail, D.T.E. 2003T-513 (C.S.)

Lorsqu’un employeur abolit un poste, il doit être capable de justifier le choix du poste à abolir. Il doit expliquer la restructuration et la manière dont l’abolition du poste l’aide dans l’atteinte de son objectif. La seule explication que les tâches de la plaignante sont les plus faciles à redistribuer n’est pas suffisante.

Matteo c. Sealrez inc., D.T.E. 2003T-275 (C.R.T.) Révision judiciaire rejetée, D.T.E. 2003T-882 (C.S.)

Le poste de la plaignante n’est pas aboli, puisqu’il était essentiel pour l’employeur de maintenir le poste de réceptionniste. L’employeur ne désirait tout simplement plus que la plaignante demeure titulaire de son poste. La conduite de l’employeur apparaît abusive, arbitraire, vexatoire et de mauvaise foi.

Blais c. Bélanger, [1998] R.J.D.T. 42 (C.A.)

La décision de l’employeur d’appliquer une directive ayant pour but d’éliminer le double emploi constitue un licenciement. Il a été démontré que la suppression du poste est justifiée par des motifs économiques ne camouflant aucun prétexte.

Critères de sélection

Bousquet c. Desjardins, D.T.E. 97T-1375 (C.A.)
Léveillée c. Murs secs Jalap, D.T.E. 93T-816 (C.A.)
Girard c. Provigo Distribution, C.A. Québec, n° 200-09-000517-950,
17 mai 1996, j. Brossard
Flou et SNC-Lavalin inc., 2018 QCTAT 2276

Le commissaire peut se pencher sur les critères de sélection utilisés par l’employeur dans le choix des employés à licencier afin de s’assurer que ce dernier n’a pas utilisé le prétexte d’un licenciement pour se débarrasser d’un employé indésirable. Ces critères doivent être objectifs, impartiaux et non inspirés d’éléments subjectifs propres à l’employé ciblé. S’ils ne le sont pas, ils seront indicatifs d’un congédiement déguisé.

Laberge c. Busque & Laflamme inc., D.T.E. 2007T-942 (C.R.T.). Révision judiciaire rejetée, D.T.E. 2009T-313 (C.S.), 350-17-000099-070. Requête pour permission d’appeler rejetée (C.A., 2009-04-23), 200-09-006633-09, AZ-50552006

Pour déterminer si nous sommes en présence d’un licenciement, la CRT ne pouvant s’immiscer dans la gestion de l’entreprise, celle-ci doit, selon ses pouvoirs, lui permettre de vérifier si l’employeur a appliqué de manière objective, impartiale ses critères de sélection, non inspirés d’éléments subjectifs propres au salarié ciblé. L’employeur fait des affaires dans le domaine de l’industrie forestière et il est établi que cette industrie traverse une crise économique grave. Afin de diminuer sa production, l’employeur a dû abolir un quart de travail. Une partie des services qu’effectuait le plaignant n’a cependant pas été abolie, puisque le remplaçant de celui-ci est toujours en poste. Après 17 années de service continu dans l’entreprise, sans avoir subi aucun reproche et jouissant d’une expertise lui permettant d’occuper divers postes, le plaignant ne s’est vu proposer par l’employeur aucune solution de rechange qui lui aurait permis de conserver son emploi. De l’aveu de l’employeur, l’arrêt de travail pour cause de maladie du plaignant et la détérioration de leur relation l’ont influencé dans sa décision de mettre à pied le plaignant. Le licenciement aura servi de prétexte et le plaignant a fait l’objet d’un congédiement déguisé puisque l’employeur a agi de manière discriminatoire.

Majdaniw c. S.N.C. Lavalin inc., [2002] R.J.D.T. 299 (C.T.)

Malgré l’existence de difficultés économiques, le fait que la décision de remercier un salarié soit influencée par des considérations subjectives, comme en l’espèce un problème de bavardage, permet de tracer la ligne entre un véritable licenciement et un congédiement. C’est un manquement d’ordre disciplinaire qui est la cause de la fin d’emploi. L’employeur a profité du contexte pour camoufler les motifs réels.

Mecugni c. Silonex, [2000] R.J.D.T. 1746 (C.T.)

L’employeur a le devoir d’être objectif tout au long du processus de sélection. En l’espèce, les critères de sélection utilisés sont objectifs et raisonnables, mais leur application est illégale puisque ce sont les caractéristiques subjectives du salarié qui l’ont emporté lors de la sélection, soit les tensions au niveau hiérarchique et une conduite jugée déloyale par l’employeur. Le licenciement a servi de prétexte.

Auger c. D.M.C. Transat inc., D.T.E. 2003T-704 (C.R.T.). Requête en révision rejetée (C.R.T., 2004-05-12), 2004 QCCRT 0274, SOQUIJ AZ-50236095

L’employeur doit utiliser les mêmes critères pour tous les employés pouvant être visés par le licenciement et il doit les appliquer de la même façon pour chacun d’eux. En l’espèce, l’évaluation du salarié est adéquate et la décision de ne pas le conserver en emploi n’est ni arbitraire ni discriminatoire.

Possibilité d'offrir un autre poste dans l'entreprise

Publications Dumont (1988) inc. c. Doré, D.T.E. 2000T-59 (C.A.)

Le cumul du service continu du salarié lui fait bénéficier, au fil des ans, d’une certaine sécurité d’emploi. L’employeur qui est dans l’obligation d’abolir le poste d’un salarié doit d’abord offrir à celui-ci un autre poste disponible dans l’entreprise avant de le remercier de ses services.

Lachapelle c. Corporation de Gestion de la Forêt de l’aigle, D.T.E. 2010T-724 (C.R.T.)

Le plaignant a assumé la fonction de directeur par intérim, entre 2005 et février 2009, moment où l’employeur l’a licencié en raison de difficultés financières. Peu de temps après, l’employeur a affiché deux postes, notamment un poste de directeur général à un salaire de 75 000 $. Le fait de ne pas avoir offert le poste au plaignant et n’ayant aucune explication à fournir pour cette modification dans un court laps de temps, l’employeur n’a pas été en mesure de faire la démonstration d’un véritable licenciement.

Voir au même effet : Guénette c. Gastier inc., D.T.E. 2010T-438 (C.R.T.)

Boutin c. Unicom Sérigraphie ltée, [2001] R.J.D.T. 1939 (C.T.)

L’employeur doit chercher de façon significative à prendre les moyens pour éviter le licenciement, notamment en offrant une formation au salarié pour lui permettre de suivre l’évolution des emplois ou de se reclasser à une autre fonction.

St-Georges c. Deschamps Pontiac Buick G.M.C. ltée, D.T.E. 97T-1342 (C.A.). Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 1998-05-21), 26379

Au moment de l’abolition du poste du plaignant, l’employeur, qui a deux autres postes disponibles, offre au salarié un des postes, mais il ne lui offre pas, par erreur, celui qui correspond le mieux à ses compétences. Le salarié refuse donc le poste. La Cour considère que la rupture du contrat de travail est due à la faute de l’employeur. Ce dernier a modifié de manière substantielle les conditions de travail du salarié en lui offrant par erreur le mauvais poste, alors que le salarié aurait accepté l’autre poste, plus intéressant. Il s’agit donc d’un congédiement déguisé.

Dugas c. Pompaction inc., D.T.E. 2001T-241 (T.T.)
Barbucci c. PriceWaterhouseCoopers S.R.L., C.R.T. Montréal, CM-1011-0381 et CM-1011-1815, 17 septembre 2003, commissaire Bussière

Lorsque le poste d’un salarié est aboli et qu’un autre poste est disponible, l’employeur doit l’offrir au salarié même si l’autre poste semble moins intéressant. Il ne peut présumer du refus du salarié d’occuper ce poste.

  1. Congédiement déguisé

Farber c. Compagnie Trust Royal, [1997] 1 R.C.S. 846

Lorsqu’un employeur décide unilatéralement de modifier de façon substantielle les conditions essentielles du contrat de travail de son employé et que celui-ci n’accepte pas ces modifications et quitte son emploi, son départ constitue non pas une démission, mais un congédiement. Il n’est pas nécessaire que l’employeur ait eu l’intention de forcer l’employé à partir ou qu’il ait été de mauvaise foi.

Joyal c. Hôpital du Christ-Roi, [1997] R.J.Q. 38 (C.A.)

Une modification unilatérale et substantielle des conditions de travail, telle une rétrogradation impliquant une diminution importante des responsabilités en matière de gestion des ressources humaines, peut équivaloir à un congédiement déguisé, sans qu’il soit nécessaire qu’il y ait une rupture complète du lien d’emploi ou démission du salarié.

Cyr c. EDS Decommissioning Canada inc., D.T.E. 2014T-17 (C.R.T.)

L’employeur (EDS) plaide qu’il a procédé au licenciement du plaignant pour manque de travail. EDS soutient que pour identifier le salarié visé, il a utilisé un critère neutre, soit l’ancienneté. EDS a retenu comme date de début d’emploi, la date inscrite sur le formulaire - fiche d’employé - que le plaignant a rempli au début janvier 2013 ; date à laquelle EDS a continué le service de gardiennage de l’entreprise précédente. Le commissaire soutient que l’application du critère d’ancienneté est déraisonnable et vicie le processus de licenciement. Il conclut que le salarié n’a pas été licencié, mais congédié sans cause juste et suffisante.

Normandin c. Camions Bécancour inc., D.T.E. 2009T-138 (C.R.T.)

Le plaignant a été embauché au tarif horaire de 18 $ pour conduire un camion et de 20 $ pour effectuer des chargements. Au printemps 2006, les besoins de l’entreprise ont diminué. L’employeur a consenti à payer 40 heures semaine le plaignant, quel que soit le nombre d’heures travaillées. Cette façon de procéder a toutefois entraîné un déficit d’heures travaillées par rapport aux heures rémunérées.

L’entente conclue au printemps 2006 constitue une condition essentielle du contrat de travail. À la fin janvier 2008, l’employeur remet en question cette entente. Il décide unilatéralement de modifier le contrat de travail du plaignant sans le consulter. Cela donne lieu à une conversation orageuse entre l’employeur et le plaignant. L’employeur lui demande de quitter les lieux. Dix jours plus tard, le plaignant manifeste son désir de retourner au travail mais l’employeur refuse.

Dans les circonstances, il s’agit d’un congédiement.

Vigie Informatique 2000 inc. c. Girard, [1998] R.J.D.T. 99 (C.S.)

Le congédiement par induction, ou congédiement déguisé, n’a pas à être le fait de la mauvaise foi de l’employeur ou d’une faute intentionnelle de sa part. Il suffit que la situation objective entraîne la rupture du contrat de travail.

Rousseau c. Sainte-Rita (Municipalité de), [2007] R.J.D.T. 565 (C.R.T.). Décision confirmée en révision judiciaire (C.S., 2008-02-01), 200-17-008447-070, D.T.E. 2008T-193

[…] « On lui confie des responsabilités supplémentaires sans lui accorder le titre et le salaire correspondants. On gère son absence suite à un accident de travail de façon tellement stricte que même la firme engagée pour effectuer une contreexpertise recommande de ne pas la faire. On lui refuse le poste de contremaître à l’année sans lui donner la moindre explication et on accepte sa démission sans poser aucune question. » […] « Même en supposant que ce favoritisme et ces injustices ne soient pas motivés par le désir de voir partir monsieur Rousseau, l’arbitraire dont a fait preuve la municipalité dans ses décisions est inadmissible, considérant par surcroît la transparence qu’exige la gestion publique. En niant à monsieur Rousseau son droit d’être traité équitablement par son employeur, la municipalité n’a pas respecté les exigences de la bonne foi qui, comme la jurisprudence l’établit, comporte des obligations de loyauté, de collaboration et de coopération dans l’exécution du contrat de travail. »

Dubois c. Cercueils Concept inc., D.T.E. 2007T-343 (C.R.T.)

L’employeur, de façon délibérée et sans raison d’affaires, a affecté le plaignant – polisseur de cercueils – à la vérification de vis. Il a été démontré que ce travail n’avait aucune utilité et n’avait pour but que d’humilier le plaignant et de l’inciter à démissionner. […] « En l’espèce, la démission du plaignant ne résulte pas d’un acte librement posé, mais est plutôt l’aboutissement d’un constat d’impuissance devant les agissements et l’attitude de l’employeur. Ce dernier a rendu ses conditions de travail pénibles au point que le plaignant a dû démissionner. »

Raymond c. Garage Réjean Roy inc., D.T.E. 2004T-1041 (C.R.T.)

« Une personne raisonnable placée dans la même situation familiale et avec les mêmes obligations serait arrivée à la conclusion que l’horaire de travail imposé par l’employeur, accompagné d’une réduction d’heures de travail et de traitement, constituait une modification substantielle de ses conditions de travail. La jurisprudence est à l’effet que lorsqu’un employeur décide unilatéralement de modifier de façon substantielle les conditions essentielles du contrat de travail de son employé et que celui-ci n’accepte pas ces modifications et quitte son emploi, son départ constitue non pas une démission, mais un congédiement déguisé. »

Rétrogradation

Joyal c. Hôpital du Christ-Roi, [1997] R.J.Q. 38 (C.A.)

Bien que la plaignante conserve son statut de cadre, sa rétrogradation à un poste subalterne comportant moins de responsabilités emporte une modification unilatérale et substantielle de ses conditions de travail et constitue un congédiement déguisé. Le fait que la plaignante ait continué de travailler et n’ait pas démissionné est sans conséquence, puisqu’elle a clairement manifesté à son employeur qu’elle n’acceptait pas la mutation.

Brault c. Commission scolaire des Navigateurs, D.T.E. 2011T-53 (C.R.T.)

Durant sa période probatoire à la suite de sa promotion à un poste de directrice adjointe dans une école, la plaignante s’est vue rétrogradée (à son ancien poste d’enseignante) en raison de ses lacunes professionnelles. Il n’y a donc pas de modifications substantielles de sa condition de travail justifiant ses prétentions voulant qu’elle ait été victime d’un congédiement déguisé.

Brisson c. Liquidation Choc inc./La Différence, D.T.E. 2003T-347 (C.R.T.)

La salariée, gérante d’un magasin, démissionne à la suite de sa rétrogradation au poste de commis, qui entraîne une diminution de ses responsabilités, une réduction du salaire et la perte de son statut. Ces éléments suffisent pour assimiler la rétrogradation à une modification substantielle de son contrat de travail. Il y a donc congédiement déguisé.

Pelland c. Société de transport de la Ville de Laval, [1999] R.J.D.T. 1707 (C.T.)

Le salarié, qui est superviseur, est rétrogradé au poste de chauffeur. Son ancienneté est touchée, ses responsabilités et ses revenus diminuent et il perd certains avantages. Il s’agit de modifications imposées unilatéralement par l’employeur qui équivalent à une répudiation du contrat de travail. L’absence de démission du salarié n’équivaut pas à une acceptation tacite. Il s’agit d’un congédiement déguisé.

Déplacement

Bouchard c. 3437302 Canada inc., D.T.E. 2003T-68 (C.R.T.)

Le déplacement de la salariée d’une succursale à une autre, la modification considérable de ses heures de travail, le fait qu’on lui impose un horaire brisé, qu’on ne lui garantisse plus le nombre d’heures hebdomadaires et qu’on l’envoie travailler à l’autre bout de la ville, la forçant ainsi à faire de longues heures de transport sans compensation, constituent une modification substantielle des conditions essentielles du contrat de travail. La salariée, qui a refusé ces modifications et a démissionné, est victime d’un congédiement déguisé.

Tisseur c. 91633 Canada ltée, D.T.E. 2001T-158 (C.T.)

Une diminution importante de la rémunération, imputable à la baisse des revenus de pourboires à la suite du déplacement d’une serveuse d’un bar très achalandé au nouveau bar très peu fréquenté, constitue, en l’espèce, une modification substantielle de ses conditions de travail.

Ouimet c. McDonald Canada et Restaurant Olinad inc., C.R.T. Montréal,CM-1011- 1416, 1er juin 2004, commissaire Dufault
Da Silva c. McDonald Canada, D.T.E. 2003T-1107 (C.R.T.)

La permutation de deux gérantes d’un restaurant à l’autre afin de tirer avantage de leurs qualités respectives ne constitue pas un congédiement déguisé, mais une réorganisation administrative. Les deux restaurants sont situés à quelques kilomètres de distance et les salariées, qui ont déjà par le passé subi de tels transferts, auraient accepté d’être transférées à condition que certains autres employés le soient eux aussi. Bien que les tâches diffèrent selon le restaurant, elles sont de même nature. Une entreprise n’est pas statique, et il est compréhensible qu’un employeur désire prendre avantage des forces et habiletés de ses ressources humaines. Le refus des gérantes d’accepter ce transfert constitue un acte d’insubordination grave et fatal.

Abus de pouvoir (voir aussi démission)

Bilodeau c. Imprimerie Miro inc., D.T.E. 2003T-93 (C.R.T.)

Lorsqu’un supérieur agresse verbalement une salariée, lui tient des propos et s’exprime à son endroit d’une façon telle que cela constitue un abus de pouvoir, le départ de la salariée à la suite de l’altercation et sa demande de préparer son relevé d’emploi ne peuvent valoir démission, puisqu’il s’agit en fait d’un congédiement déguisé.

  1. Démission

Roy c. Constructions paysannes inc., [1999] R.J.D.T. 1741 (C.T.)
Savard c. M.B. Data Processing, D.T.E. 82T-857 (T.A.)

La démission doit être analysée en fonction des éléments suivants : « a) Toute démission comporte à la fois un élément objectif et subjectif ; b) La démission est un droit qui appartient à l’employé et non à l’employeur, elle doit donc être volontaire ; c) La démission s’apprécie différemment selon que l’intention de démissionner est ou non exprimée ; d) L’intention de démissionner ne se présume que si la conduite de l’employé est incompatible avec une autre interprétation ; e) L’expression de son intention de démissionner n’est pas nécessairement concluante quant à la véritable intention de l’employé ; f) En cas d’ambiguïté, la jurisprudence refuse généralement de conclure à une démission ; g) La conduite antérieure et ultérieure des parties constitue un élément pertinent dans l’appréciation de l’existence d’une démission. »

Distribution Zone électronique inc. c. Tribunal administratif du travail, 2018 QCCS 1305

Le salarié avait avisé l’employeur de sa démission effective onze mois plus tard, mais l’employeur décide que son travail se terminera avant. Or, ni la démission à terme du salarié ni le préavis de fin d’emploi de l’employeur n’ont pour effet immédiat de libérer les parties des droits et obligations qui les lient et leur contrat de travail existe encore après l’un et l’autre de ces préavis. Puisque le contrat de travail est encore en vigueur malgré le départ prochain du salarié, l’article 124 LNT s’applique encore et l’employeur ne pouvait pas le congédier à moins de prouver une cause juste et suffisante.

La démission ne se présume pas

Boucher c. Commission scolaire de l’Énergie, D.T.E. 2003T-443 (C.R.T.). Révision judiciaire rejetée, D.T.E. 2005T-65 (C.S.)

La démission ne se présume pas. Elle doit s’appuyer sur une volonté claire et sans équivoque de démissionner de la part du salarié, de même que sur des gestes positifs de sa part. Le fait, pour un salarié, de négliger de confirmer son refus quant à la modification de ses conditions de travail dans les délais impartis par l’employeur ne permet pas de conclure à l’abandon de son emploi ou à la démission..

Chaulk c. Agence de permis Nova, [1998] R.J.D.T. 197 (C.T.)

Deux critères servent à évaluer s’il y a démission : le critère subjectif, c’est-à-dire l’intention de rompre le lien d’emploi, et le critère objectif, soit l’acte positif par lequel le salarié exprime sa volonté de rompre ce lien. En l’espèce, après avoir quitté le travail depuis une semaine à la suite d’une altercation avec son patron, la salariée refuse de revenir en emploi après une demande formelle à cet effet. Ce refus constitue une démission.

Consentement valable

Syndicat des professeurs du Collège François-Xavier-Garneau c. Morin, D.T.E. 2000T-733 (C.A.)

Une démission ne sera valide que si le consentement du salarié est valable. Pour que la démission soit valide, le consentement doit être donné par une personne apte, et il doit être libre et éclairé. Lorsque l’employeur utilise divers moyens, comme la menace, la contrainte, des tracasseries ou du harcèlement pour obtenir la démission du salarié, celle-ci n’est pas valide et il s’agit d’un congédiement déguisé.

Paquet c. Gabriel Mercier ltée, D.T.E. 2000T-493 (C.A.)

Pour être en présence d’une démission, il faut que le consentement donné par le salarié soit valable. En l’espèce, le salarié ne pouvait pas donner un consentement valable en raison de son état psychique, engendré par le conflit sous-jacent présent entre son patron et lui depuis plus d’un an. Son intention véritable était de conserver son emploi. Il s’agit d’un congédiement déguisé.

Pipon c. Claro Précision inc., D.T.E. 2002T-652 (C.T.)

Lors d’une rencontre dans le bureau de l’employeur, celui-ci porte de fausses accusations contre le salarié et le menace. Le salarié se sent alors dans une impasse et donne sa démission. Il dépose une plainte pour congédiement injustifié dans les jours suivants. La véritable intention du salarié n’était pas de démissionner. La démission n’est pas valide, car elle n’est pas libre et volontaire.

Faits postérieurs à la démission

Blanchette c. 2853-3123 Québec inc. (Cocktail Soleil enr.), C.R.T. Québec, CQ-1010-
9638, 31 janvier 2003, commissaire Barrette

La conduite antérieure et postérieure des parties permet de déterminer s’il y a eu démission. En l’espèce, la conduite des parties accrédite la thèse du congédiement. D’une part, la salariée conteste la mention de départ volontaire sur son relevé d’emploi et elle dépose une plainte à la Commission des normes du travail dès le lendemain. D’autre part, l’employeur a préparé rapidement le relevé d’emploi et il demande à la salariée de lui remettre immédiatement les clés.

Fournier c. Sobeys, C.R.T. Québec, CQ-2009-1330, 2010 QCCRT 0358, 16 juillet 2010, commissaire Daigle

Bien que la plaignante ait rédigé sa lettre de démission à tête reposée, l’intention sous-jacente à cette lettre était de dénoncer un état de fait rendant impossible la continuation de l’emploi pour elle. La fin d’emploi était plus de l’ordre d’un congédiement déguisé que d’une démission.

Après réintégration

Deschênes c. Valeurs Mobilières Banque Laurentienne inc, [2008] R.J.D.T. 203 (C.R.T.). Requête en irrecevabilité accueillie (D.T.E. 2008T-882 (C.S.). Appel rejeté, [2010] R.J.D.T. 1076 (C.A.). Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 2011-06-16 (C.S. Can.), 34081

À la suite d’une décision de la Commission des relations du travail rétablissant le lien d’emploi, les parties ont eu plusieurs échanges entourant l’ordonnance de réintégration mais elles n’ont pu parvenir à un terrain d’entente. La plaignante n’a pas repris son emploi en prétendant que l’employeur a modifié de façon substantielle ses conditions de travail. Elle a déposé une nouvelle plainte à l’encontre d’un congédiement.

Si un problème existe dans l’exécution d’une ordonnance de réintégration, la Commission des relations du travail a compétence pour déterminer si le salarié a démissionné ou si ses conditions de travail ont fait l’objet d’une modification substantielle équivalant à un congédiement déguisé.

Par ailleurs, après analyse des faits mis en preuve, la Commission des relations du travail a conclu à une démission.

B. Cause juste et suffisante
Malo c. Côté-Desbiolles, [1995] R.J.Q. 1686 (C.A.). Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 1996-02-01), 24899

La cause juste et suffisante est soit liée à l’employé, dans le cas d’une incapacité, d’une faute grave ou d’une accumulation de manquements à la discipline, soit liée à l’employeur, par exemple dans le cas d’une réorganisation de l’entreprise ou de difficultés économiques.

Wallace c. United Grain Growers Ltd., [1997] 3 R.C.S. 701
Rivard c. Atlantic Produits d’emballage ltée, [1999] R.J.D.T. 207 (C.T.)

Les employeurs ont une obligation de bonne foi et de traitement équitable envers les salariés dans le mode de congédiement. Les employeurs doivent être francs, raisonnables et honnêtes avec leurs employés.

Fardeau de preuve

Liberty Mutual Insurance Co. c. Commission des normes du travail, D.T.E. 90T-872 (C.A.)

Le tribunal civil, saisi d’un recours en vertu de l’article 83 de la LNT, est lié par la conclusion du commissaire qui conclut que le salarié a commis un acte grave d’insubordination. Ce motif a acquis l’autorité de la chose jugée.

Lagacé c. 9132-5126 Québec inc., [2011] R.J.D.T. 1073 (C.R.T.)

La Cour du Québec a conclu dans un jugement que la plaignante n’était pas l’auteure du vol d’argent chez son employeur. À l’audience de la C.R.T., l’employeur a tenté d’exposer la même preuve qu’il a présentée à la Cour du Québec afin de démontrer la raison du congédiement de la plaignante. Le commissaire refuse que l’employeur recommence cette démonstration au motif qu’il y a chose jugée implicite sur la cause alléguée. Il serait impossible de lui permettre de recommencer cette démonstration sans porter atteinte aux principes d’économie, de cohérence, de caractère définitif des instances et d’intégrité de l’administration de la justice.

Massotti c. Stationnement métropolitain inc., D.T.E. 2003T-259 (C.S.)
Ruel c. Distribution Emblème inc., D.T.E. 96T-1155 (C.T.)

C’est à l’employeur que revient le fardeau de faire la preuve de la cause juste et suffisante de congédiement, que ce soit en matière de congédiement disciplinaire ou administratif. L’employeur doit donc faire cette preuve en premier lieu, une fois les conditions d’ouverture du recours établies.

Jeu pathologique

Tremblay c. Taverne Le Chalan inc. (Bar 760 enr.), [2007] R.J.D.T. 503 (C.R.T.)

L’employeur a manqué à son obligation de sauvegarder la dignité et la réputation de la plaignante en informant ses clients de la raison du congédiement. Il leur a mentionné qu’elle avait un problème de « joueuse compulsive », qu’elle utilisait l’argent de la caisse pour jouer à la loterie vidéo. Toutefois, il a omis de les informer que la plaignante remboursait toujours les sommes empruntées et qu’aucun préjudice n’a été subi. […] « Non seulement, se refusent-ils à l’aider, ou simplement à l’accompagner, dans une période de grande fragilité et alors qu’ils n’ont subi personnellement ou leur établissement de commerce aucun préjudice. Au contraire, ils abusent de leur position pour en remettre. Ils agissent en dehors du cadre d’une relation de travail normale, et ce, de façon totalement gratuite et injustifiée. Ce faisant, ils font perdre l’estime et la considération envers madame Tremblay même s’il est juste qu’elle faisait alors face à une dépendance au jeu. » En raison du comportement de l’employeur, la plaignante reçoit une somme de 5 000,00 $.

Alcoolisme et toxicomanie

Garceau c. Sico inc., D.T.E 2006T-196 (C.R.T.)

Le plaignant a été surpris à consommer de la cocaïne sur les lieux du travail. Quelques mois plus tard, à la suggestion de l’employeur, il a entrepris une cure de désintoxication. À son retour au travail, une « entente de dernière chance » fut conclue avec son employeur. Cette entente autorisait l’employeur à faire subir un test de dépistage au plaignant et, si le résultat était positif, l’employeur procéderait au congédiement. Il a été mis en preuve que le plaignant a consommé de la drogue lors d’une activité extérieure organisée pour la clientèle. Le plaignant a, par la suite, subi un test de dépistage, qui s’est avéré positif. Le congédiement a donc suivi. « La consommation de drogue, même illicite, à l’extérieur du travail ne justifie pas, à elle seule, de discipliner un salarié. Il faut pour cela qu’il ait un effet préjudiciable sur son travail ou sur l’image de l’employeur. » Compte tenu de la garantie du respect de la vie privée prévue à l’article 5 de la Charte des droits et libertés de la personne, l’employeur ne pouvait sanctionner la conduite du plaignant dans sa vie privée à moins qu’il n’en subisse lui-même un préjudice.

Antécédents judiciaires

Dulude c. La Maison le Réverbère inc., [2009] R.J.D.T. 1181 (C.R.T.)

Le plaignant travaillait à titre d’intervenant dans une maison d’hébergement pour adultes en difficulté. Ayant appris l’existence d’antécédents judiciaires du plaignant (agression sexuelle, voies de fait, menaces de mort à l’égard d’une ex-conjointe), l’employeur l’a congédié. L’employeur prétendait que les antécédents judiciaires du plaignant le rendaient inapte ou inhabile à occuper sa fonction d’intervenant. Pour l’employeur, l’article 18.2 de la Charte des droits et libertés de la personne n’interdit pas à un employeur de congédier un salarié en raison de ses antécédents judiciaires dans la mesure où il y a un lien entre l’infraction criminelle et le poste occupé. La Commission des relations du travail accueille la plainte en vertu de l’article 124 LNT et conclut que, malgré la gravité des infractions commises, l’employeur n’a pas démontré un lien objectif et tangible entre celles-ci et l’emploi d’intervenant.

Insubordination

Marcil c. Trois-Rivières (Ville de), D.T.E. 2003T-225 (C.R.T.)

L’insubordination implique une intention de défier l’autorité, de ne pas suivre les directives et de refuser sciemment d’obéir. Trois conditions sont nécessaires pour conclure à l’insubordination :

  1. il y a existence d’un ordre ;
  2. l’ordre doit avoir été donné par une personne ayant le pouvoir de le faire ;
  3. le refus d’obéir du salarié est nécessaire. L’ordre doit être clair, précis et communiqué sans ambiguïté.
Lelièvre c. Unipêche M.D.M. ltée, D.T.E. 2003T-1166 (C.R.T.). Requête en révision judiciaire rejetée, D.T.E. 2004T-1100. Appel rejeté sur requête (C.A., 2005-01-31),200-09-005004-046, 2005 QCCA 171, SOQUIJ AZ-50297320 Savard c. For-Net inc., [1983] T.T. 145

La règle du « obey now and grieve later » (obéir maintenant et déposer une plainte plus tard) comporte certaines exceptions. Un employé peut refuser d’obéir à un ordre illégal, dont l’exécution peut comporter une infraction à une loi ou à un règlement, sans être taxé d’insubordination. Il en est de même, notamment, lorsque l’ordre peut mettre en danger la santé et la sécurité ou lorsqu’il est déraisonnable, discriminatoire ou constitue un abus de droit.

Potvin c. Cassidy, [1997] C.T. 68

Le refus d’un salarié de suivre une formation visant à améliorer la qualification de la main-d’oeuvre constitue un acte d’insubordination. La politique de gestion de l’employeur en matière de formation du personnel est normale, pertinente, juste et raisonnable. Le plaignant a refusé sans motif sérieux de suivre le cours après une mise en demeure formelle, il a été avisé qu’à défaut de le suivre il serait congédié et il a répété, lors de l’audience, que, si c’était à refaire, il refuserait de nouveau. Considérant qu’il n’y a aucune chance pour que le salarié amende sa conduite, le congédiement est justifié.

Gagnon c. F.D.L. Cie ltée, [1993] C.T. 228. Requête en évocation rejetée (C.S., 1993-10-18), 500-05-004277-933

Les nombreux refus de la salariée d’exécuter les tâches que lui confie son supérieur, accompagnés d’injures, d’actes de violence et même en dernier lieu de menaces de mort, constituent une insubordination justifiant le congédiement.

Le Syndicat québécois des employés et employées de service, section locale 298 (FTQ) c. C.H.S.L.D. Vigi Reine Élizabeth, D.T.E. 2007T-472 (T.A.)

La plaignante est préposée aux bénéficiaires et représentante syndicale. Elle dépose un grief collectif de harcèlement à l’encontre du coordonnateur de soins. Une enquête est amorcée. Seize des dix-huit salariés ont été rencontrés. Tous ont nié avoir signé un quelconque grief de harcèlement. Par contre, plusieurs se souviennent avoir signé une pétition ayant pour objet l’ajout d’un préposé à la relève de soir. Il n’y a aucune preuve que le coordonnateur a fait subir une forme de harcèlement aux employés. On peut conclure qu’il n’y a jamais eu de fondement à un grief collectif de harcèlement.

La plaignante a commis une faute grave en déposant une fausse accusation de harcèlement contre son supérieur. De plus, elle a utilisé son statut de représentante syndicale, aux fins d’obtenir les signatures de ses collègues à leur insu.

  1. Congédiement - mesure disciplinaire

Progression des sanctions

Blanchard c. Control Data Canada Ltd., [1984] 2 R.C.S. 476 ;Conseil de l’éducation de Toronto (Cité) c. F.E.E.E.S.O., District 15, [1997] 1 R.C.S. 487

Afin de déterminer si un salarié a été congédié pour une cause juste et suffisante, il faut procéder à un examen en trois étapes :

  1. Le salarié est-il effectivement responsable de la mauvaise conduite qui lui est reprochée?
  2. La mauvaise conduite justifie-t-elle la prise de mesures disciplinaires?
  3. Les mesures disciplinaires imposées au salarié sont-elles proportionnelles à la faute commise ? Autrement dit, sont-elles appropriées au regard de la mauvaise conduite et des autres circonstances pertinentes ?
Future Electronics inc. c. Monette, D.T.E. 2003T-420 (C.S.)

L’employeur doit respecter la progression des sanctions avant d’imposer un congédiement à un salarié. Pour que les fautes antérieures puissent servir dans l’évaluation de la cause juste et suffisante de congédiement, elles devront avoir fait l’objet de réprimandes par l’employeur.

Delorme c. Albany International Canada inc., D.T.E. 2013T-541 (C.R.T.)

Le plaignant travaillait à titre de magasinier avant d’être congédié après 10 années de service. Il avait un comportement inapproprié qui se manifestait par une humeur changeante, il faisait des menaces et intimidait sa collègue. Sa conduite allait au-delà d’une personne à caractère grognon. Il a été avisé à plusieurs reprises par l’employeur que son comportement était inacceptable.Le commissaire soutient que le harcèlement psychologique du plaignant exercé à l’endroit d’une collègue constitue une faute grave qui pourrait faire l’objet d’un congédiement sans gradation des sanctions, en regard des circonstances, telles que la durée, la répétition et la gravité des gestes posés.

Cardinal c. Transports Inter-Nord inc., C.R.T. Montréal, CM-2000-2111, 19 février 2004, commissaire Côté-Desbiolles

En l’absence de fraude ou de faute grave, rien ne justifie que l’employeur impose la peine capitale sans avoir cherché par d’autres moyens à faire changer son comportement au salarié. Il est vrai que l’employeur ne pouvait suspendre le salarié sans compromettre ses activités, mais il aurait dû lui faire part de ses insatisfactions et de ses attentes précises et l’informer qu’à défaut de se conformer il serait congédié.

Parisé c. Services ménagers Roy (Hôtellerie) ltée, [2000] R.J.D.T. 237 (C.T.)

L’objectif poursuivi par les mesures disciplinaires est de signifier au salarié les manquements qui lui sont reprochés afin de lui donner l’occasion d’amender sa conduite. En l’absence de faute grave, la théorie de la gradation des sanctions doit s’appliquer.

Roy c. Disque Améric inc., D.T.E. 97T-906 (C.T.)

Le salarié est congédié en raison de ses nombreux retards. Avant son congédiement, il a reçu deux avis disciplinaires, une suspension de trois mois et une autre suspension d’une semaine pour ce motif. La progression des sanctions est respectée et le salarié était avisé qu’à défaut de se conformer il serait congédié. Le congédiement ne peut être qualifié d’injuste.

Durocher et Gestion Adec inc. — Tim Hortons # 100339, 2017 QCTAT 4339

« […] la jurisprudence, tout en admettant que le principe de la progression des sanctions s’applique aux cadres, autres que les cadres supérieurs au sens de la Loi, précise que cette règle ne doit pas être appliquée avec la même rigueur étant donné qu’un cadre doit normalement connaître ses obligations sans que l’employeur soit tenu de les lui souligner. Cette vision est particulièrement suivie dans le contexte d’une petite entreprise. »

Double sanction

Lévesque c. Caisse populaire Desjardins de Sainte-Anne-du-Lac, [2001] R.J.D.T. 206 (C.T.)

Un salarié ne peut se voir imposer deux mesures disciplinaires pour sanctionner un même manquement. En l’espèce, le salarié s’est vu imposer une suspension en raison d’une faute qui lui est reprochée. Comme le congédiement qui survient par la suite vise à sanctionner la même faute, il y a double sanction. Le congédiement est injustifié.

Politique de l'entreprise

Frégeau c. Magasins Wal-Mart Canada inc., D.T.E. 98T-446 (C.T.). Décision confirmée en Cour supérieure par D.T.E. 99T-45 (C.S.)

Le congédiement du plaignant après deux retards, qui ont fait en sorte que les autres employés attendent à la porte l’ouverture du magasin, est une sanction disproportionnée. Par ailleurs, la politique de l’entreprise voulant qu’une deuxième infraction en 12 mois entraîne le congédiement ne fait pas perdre compétence au Commissaire du travail pour évaluer la proportionnalité de la sanction imposée en relation avec la faute.

  1. Congédiement administratif / incompétence et incapacité

Syndicat des employés de Molson c. Brasserie Molson O’Keefe, C.A. Montréal, n° 500-09-000211-938, 3 avril 1998, jj. Chouinard, Mailhot, Pidgeon
Syndicat des employés municipaux de Jonquière section locale 2466 (S.C.F.P.) et Deschênes c. Jonquière (Ville de), [1998] R.J.D.T. 5 (C.A.)
Naqvi c. Finitions Ultraspec inc., D.T.E. 98T-1220 (C.T.)

Il faut distinguer la mesure administrative de la mesure disciplinaire. La mesure administrative découle d’un manquement involontaire du salarié, telle l’incapacité ou l’incompétence. Elle vise à régler une situation d’inefficacité qui est créée par le manquement involontaire du salarié et n’a pas d’intention punitive. À l’opposé, la mesure disciplinaire met en cause le caractère volontaire du manquement reproché au salarié. Elle vise à punir afin de permettre au salarié de s’amender par le moyen de la progression des sanctions.

Legris c. Société de transport de la Ville de Laval, [1996] C.T. 120

La compétence du Commissaire du travail, en matière de congédiement administratif, se limite à confirmer ou à annuler la décision de l’employeur. Contrairement aux problèmes disciplinaires, il est impossible, en matière administrative, de corriger une situation par le recours à des mesures comme la suspension. « Un individu est incapable ou incompétent ou bien il ne l’est pas. »

Papaeconomou c. Pratt & Whitney Canada inc., D.T.E. 99T-287 (C.T.)

La salariée est congédiée pour cause d’incompétence. Les faits reprochés, soit le comportement, l’attitude, les relations interpersonnelles, le manque de coopération, le rendement insuffisant et le refus de se soumettre à une expertise psychiatrique, sont de nature disciplinaire. Les agissements fautifs sont volontaires et intentionnels et ils auraient pu être corrigés par une approche disciplinaire appropriée. Il ne s’agit donc pas d’un congédiement administratif.

Obligations de l'employeur

Garage Montplaisir ltée c. Couture, D.T.E. 2001T-1090 (C.S.)
Laplante c. Costco Wholesale Canada Ltd., D.T.E. 2003T-1058 (C.R.T.). Requête en révision judiciaire rejetée, D.T.E. 2004T-843 (C.S.). Appel rejeté avec dissidence, D.T.E 2005T-831 (C.A.)

Avant de congédier un salarié pour cause d’incompétence, l’employeur doit :

  1. informer le salarié de ses attentes et des politiques de l’entreprise ;
  2. lui signaler ses lacunes ;
  3. lui apporter le soutien nécessaire pour se corriger et atteindre les objectifs ;
  4. lui accorder un délai raisonnable pour s’ajuster et ;
  5. l’informer clairement de la possibilité d’un congédiement à défaut d’amélioration de sa part. Un employeur qui ne suit pas cette procédure agit de façon abusive et déraisonnable.
Biochem Thérapeutique inc. c. Dufault, D.T.E. 99T-288 (C.S.)

L’employeur, qui allègue que la salariée est devenue incompétente pour exécuter ses tâches à la suite d’une réorganisation qui a transformé son poste de commis-comptable en un poste de commis principal, a une obligation de formation envers cette salariée, en raison de la complexité des nouvelles tâches, de la capacité de la salariée d’effectuer ces nouvelles tâches et de l’étendue de la formation requise.

Brisson c. Liquidation Choc inc./La Différence, D.T.E. 2003T-347 (C.R.T.)

La plaignante est rétrogradée en raison de son incapacité et de son inaptitude relativement à l’exécution de certaines tâches. L’employeur aurait dû lui enseigner des techniques efficaces pour améliorer ses méthodes de travail et son rendement. En omettant d’agir ainsi, il l’a traitée de façon abusive et inéquitable. Dans l’exercice de son droit de gérance, les décisions de l’employeur ne doivent pas revêtir un caractère arbitraire, discriminatoire, déraisonnable et inéquitable.

Gagné c. Les Agences Claude Marchand inc., [1999] R.J.D.T. 560 (C.T.)

Lorsqu’un employeur allègue que la rupture d’emploi est liée à la restructuration de l’entreprise et à la transformation du poste du salarié, le rendant ainsi trop complexe pour ce dernier, il doit convaincre le commissaire par une preuve prépondérante de l’inaptitude du salarié à être maintenu en emploi dans ce nouveau poste.

B. (S.) c. Magasin M…, [1997] C.T. 495

Un employeur peut congédier un salarié qui ne parvient plus à remplir ses obligations contractuelles et qui ne satisfait plus aux normes de l’entreprise. En l’espèce, le salarié est congédié parce que son rendement est insatisfaisant depuis deux ans et demi. L’employeur a respecté ses obligations : le salarié a été avisé à maintes reprises qu’il devait atteindre les quotas minimums de ventes sous peine de congédiement, il a été aidé et il a disposé d’un délai suffisant pour corriger la situation. La plainte est rejetée.

Accommodement raisonnable et droit de l'emploi

Brunet c. Arthrolab inc., [2007] R.J.D.T. 1065 (C.R.T.). Requête en révision judiciaire accueillie D.T.E. 2008T-540 (C.S.). Appel accueilli [2010] R.J.D.T. 29 (C.A.). Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 2010-06-10 (C.S. Can.), 33615.

Lorsque nous sommes en présence d’un congédiement administratif (absence pour maladie) et pour que ce congédiement soit maintenu, l’employeur doit être en mesure de démontrer un taux d’absentéisme chronique, un préjudice en résultant pour l’entreprise et, enfin, l’incapacité du salarié de fournir une prestation de travail dans un avenir rapproché. L’employeur devra aussi tenir compte, lorsqu’un salarié est atteint d’une incapacité physique ou psychologique, du régime des droits fondamentaux garantis par la Charte des droits et liberté de la personne, car la Cour suprême a reconnu la maladie comme un « handicap » au sens de l’article 10 de la charte (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec c. Ville de Montréal). L’employeur doit analyser la situation de manière approfondie avant de conclure que cette absence ou ce retour progressif comporte une contrainte excessive.

Charbonneau c. Gestolex, Société en commandite, [2007] R.J.D.T. 175 (C.R.T.)

« La Commission juge que l’absence de la plaignante ne constitue pas en soi un préjudice à l’employeur. La jurisprudence exige davantage en matière de préjudice, d’autant que, dans le cas en l’espèce, cela n’a rien coûté à l’employeur puisque Mme Charbonneau bénéficiait des indemnités de la SAQ. Ainsi, pendant ces deux années, si la plaignante n’a pas offert sa prestation de travail, l’employeur, de son côté, n’a pas eu à verser une rémunération, malgré son obligation en vertu de 2085 C.c. »

Langlois c. Gaz Métropolitain inc., [2004] R.J.D.T. 1111 (C.R.T.)

Au fil des ans, les tribunaux ont déterminé certains facteurs à considérer afin d’apprécier le caractère excessif de la mesure d’accommodement. Pour les employeurs à qui l’on réclame une mesure d’accommodement, ils ont considéré : le coût réel de l’accommodement demandé en tenant compte de la nature de l’entreprise et de sa santé financière ; l’effet préjudiciable de l’accommodement sur la victime de la discrimination et sur les autres membres du personnel ; l’effet de l’accommodement sur le bon fonctionnement de l’entreprise. Les facteurs doivent être appliqués d’une manière conforme au bon sens, en fonction des faits associés à chaque cas. [...] le remplacement de la plaignante a occasionné un dédoublement de frais sans oublier les perturbations associées à son absence et la perte de l’expertise acquise par le consultant qui l’a remplacée. Le retour progressif au travail aurait bien sûr entraîné d’autres coûts financiers et nécessité certains réaménagements. Toutefois, ces conséquences n’auraient pas été excessives pour l’employeur. Gaz Métro, une entreprise d’envergure au Québec, n’est pas dépourvue sur le plan organisationnel. Il lui aurait été raisonnablement possible de composer avec cet accommodement sans que cela nuise au bon fonctionnement de l’entreprise.

Alix c. Prodair Canada ltée, D.T.E. 2007T-18 (C.R.T.). Décision confirmée en révision par [2007] R.J.D.T. 1132 (C.R.T.)

En se plaçant à la mauvaise époque pour évaluer le comportement du requérant, le commissaire commet une erreur manifeste, puisqu’il ignore les règles d’application du principe de l’accommodement raisonnable. En effet, prétendre que le comportement du salarié, antérieurement à la naissance de l’obligation d’accommodement, justifiait, à lui seul, de ne pas l’accommoder, constitue une erreur de nature à invalider la décision. Cette erreur est commise autant à l’égard de la plainte déposée en vertu de l’article 122 de la loi qu’à celle relevant de l’article 124.

Dumaine c. Urgence Bois-Francs inc., D.T.E. 2007T-283 (C.R.T.)
Voir aussi : M.D. c. Caisse populaire Desjardins de Joliette, D.T.E. 2003T-962 (C.R.T.)

L’accommodement raisonnable ne doit pas constituer pour l’employeur une contrainte excessive. Or, dans la présente affaire, la seule solution qui s’offre à l’employeur est de créer pour le plaignant un poste qui n’existe pas dans son entreprise, ce qui engendrerait des coûts substantiels puisque l’employeur n’a pas besoin d’un poste semblable dans sa structure actuelle. « [...] l’obligation d’accommodement n’est ni absolue, ni illimitée et, dans ce cas-ci, l’employeur s’est déchargé de son obligation d’accommoder le plaignant. »

Gaulin et 9131-1811 Québec inc., 2018 QCTAT 4189

Il est vrai que l’employeur s’est acquitté de ses obligations en regard des dispositions de la Loi sur les normes du travail. Le lien d’emploi a même été maintenu malgré une absence pour maladie de plus de 26 semaines. Cela ne suffit toutefois pas pour rejeter la plainte de congédiement sans cause juste et suffisante, lorsque, comme en l’espèce, la salariée soutient avoir fait l’objet de discrimination contraire à la Charte des droits et libertés de la personne. Évidemment, le congédiement n’est pas discriminatoire pour autant. L’employeur peut mettre fin à l’emploi d’une salariée qui ne peut pas fournir sa prestation de travail, mais uniquement après avoir raisonnablement tenté d’adapter ses exigences pour lui permettre de conserver son emploi, sans aller jusqu’à la contrainte excessive. En congédiant la salariée sans vérifier la possibilité d’un retour au travail dans un avenir prévisible, l’employeur n’a pas fait face à ses obligations d’accommodement. Le congédiement est donc discriminatoire et la plainte sous l'article 124 LNT est accueillie.

Faits postérieurs au congédiement

Cie minière Québec Cartier c. Québec (Arbitre des griefs), [1995] 2 R.C.S. 1095

Dans l’examen de la cause juste et suffisante de congédiement, le commissaire ne peut pas tenir compte des faits postérieurs au congédiement. Il doit examiner si, au moment du congédiement, l’employeur avait une cause juste et suffisante pour congédier le salarié. Les faits qui sont survenus par la suite ne peuvent donc pas entrer en ligne de compte.

C. délai de 45 jours

Impossibilité d'agir

Bouchard c. Girard, D.T.E. 98T-13 (C.S.)

Le délai de 45 jours de l’article 124 LNT est un délai de rigueur.

Parent c. École secondaire François-Bourrin, D.T.E. 99T-610 (C.T.)

Le délai de l’article 124 LNT est de rigueur. Toutefois, l’impossibilité d’agir est une cause de suspension de la prescription (art. 2904 C.c.Q.) et permet au commissaire de proroger le délai de 45 jours de l’article 124 LNT. Il faut cependant une incapacité totale de déposer la plainte dans le délai prescrit.

Saulnier c. Légion royale canadienne (Filiale Dion Québec 238), D.T.E. 96T-1343 (T.T.)
Pelletier c. Richard Veilleux imprimeur lithographe inc., B.C.G.T. Montréal, CM9707S082, 2 février 1999, commissaire Couture

Pour qu’il y ait impossibilité d’agir permettant de proroger le délai pour déposer une plainte sous l’article 124 LNT, il ne suffit pas que le fait de ne pas avoir agi à temps soit compréhensible ou excusable, il faut qu’il y ait eu impossibilité raisonnable de le faire.

Mauvais forum

Neptune c. (Québec) Ministère du Revenu, [2000] R.J.D.T. 1121 (C.T.)

Roberge c. Régie des assurances agricoles du Québec, [1999] R.J.D.T. 1673 (C.T.)

Comme le délai de 45 jours de l’article 124 LNT n’emporte pas déchéance, l’article 2895 C.c.Q. peut trouver application. Lorsqu’une plainte est déposée dans le délai de 45 jours mais devant le mauvais forum et qu’elle est rejetée sans qu’une décision soit rendue sur le fond du litige, le délai de prescription peut alors être prorogé de trois mois à compter de la réception de la décision.

Départ de la prescription

L’Heureux c. Maxinet enr., D.T.E. 2000T-60 (C.T.)

Le délai commence à courir le jour où le salarié prend connaissance du fait qu’il a été congédié. En l’espèce, le salarié est remercié de ses services pour cause de manque de travail. Le délai de 45 jours commence à courir au moment où il apprend qu’il n’a pas été licencié mais plutôt congédié, puisque les autres salariés licenciés en même temps que lui sont rappelés au travail.

Garage Montplaisir ltée c. Couture, D.T.E. 2001T-1090 (C.S.)

Le plaignant subit une rétrogradation qu’il accepte à condition de conserver son salaire. Son salaire est diminué six mois plus tard. Qu’il ait été avisé de la baisse future de son salaire lors de la rétrogradation n’a aucune importance. À ce moment, il avait deux choix : déposer une plainte immédiatement ou déposer la même plainte au moment de la baisse effective de salaire. La date de départ pour la computation du délai est la date où le changement de salaire est devenu effectif

Lavergne c. Les Industries Fermco ltée et autres, D.T.E. 2009T-100 (C.R.T.)
Université McGill c. Ong, D.T.E. 2014T-198 (C.A.)

La procédure d’arbitrage prévue dans la convention ne constitue pas une autre procédure de réparation au sens de l’article 124 LNT en ce qu’elle ne confère pas une efficacité équivalente au recours sans frais offert devant la C.R.T.

Longpré c. Commission scolaire des Affluents, D.T.E. 2013T-35 (C.R.T.). Confirmé en révision judiciaire, D.T.E 2014T-196 (C.S.)

L’employeur soulève un moyen préliminaire à l’effet que la salariée bénéficie d’une procédure de réparation en vertu du Règlement déterminant certaines conditions de travail des cadres des commissions scolaires et du Comité de gestion de la taxe scolaire de l’Île de Montréal (CSDA) équivalant à un recours en vertu de l’article 124 LNT. Deux éléments se distinguent. Le comité d’appel ne peut obliger le CSDA à réintégrer la salariée dans son poste, c’est l’employeur qui détermine dans quel poste elle sera réintégrée. De même, ce comité ne peut ordonner le paiement de dommages moraux, punitifs ou autres ou rendre toute autre ordonnance appropriée contrairement aux pouvoirs dont dispose la C.R.T. en vertu de l’article 128 LNT.

La C.R.T. considère que les mesures de réparations accordées par ce règlement et du CSDA ne sont pas équivalentes à celles offertes au recours suivant l’article 124 LNT. Le 27 février 2007, le plaignant a reçu un avis de congédiement signé par le président. Le 5 mars suivant, il s’est présenté au travail à la demande expresse d’un représentant de l’employeur. Celui-ci lui demande de ne pas tenir compte de l’avis du 27 février 2007. Le plaignant reçoit son salaire jusqu’au 16 avril 2007. Or, cette situation a créé un doute quant à la réalité de son congédiement. C’est à cette date qu’il croit avoir été congédié. Le 22 mai suivant, une plainte pour congédiement sans cause juste et suffisante est déposée. La Commission des relations du travail en vient à la conclusion que la plainte a été déposée à l’intérieur du délai de 45 jours requis par la loi.

Jean-François c. L.V.M. Tech inc., D.T.E. 96T-1377 (C.T.)

Ce n’est qu’à partir du moment où un salarié apprend qu’il ne sera pas rappelé au travail que le délai de 45 jours commence à courir, et non au moment où il reçoit, comme à chaque automne, un avis de cessation d’emploi ne mentionnant aucune date de retour au travail. En l’espèce, ce n’est que le 30 juin suivant que le salarié apprend qu’il ne sera pas rappelé pour travailler pendant l’été. Le délai de 45 jours commence à courir à partir de cette date.

D. autre procédure de réparation

Malo c. Côté-Desbiolles, [1995] R.J.Q. 1686 (C.A.). Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 1996-02-01), 24899

Premièrement, l’autre procédure de réparation doit revêtir un caractère obligatoire, c’est-à-dire qu’une partie doit pouvoir contraindre l’autre à s’y soumettre et que la décision rendue doit être exécutoire. Deuxièmement, le recours doit être similaire au recours de l’article 124 LNT. Enfin, le décideur doit avoir des pouvoirs équivalents à ceux qui sont prévus à l’article 128 LNT.

Procureur général du Québec c. Syndicat de la fonction publique du Québec et autres, [2010] 2 R.C.S. 61

Des salariés syndiqués cumulant plus de deux ans de service continu ont invoqué la protection de l’article 124 LNT alors que la convention collective qui leur était applicable leur niait le droit de grief en cas de cessation d’emploi, et ce, en raison de leur statut.

Les cas étudiés par la Cour suprême regroupaient des employés à statut temporaire (saisonnier, stage probatoire, …).

La Cour suprême a jugé que ces clauses étaient illégales et en contravention de la Loi sur les normes du travail. Dans la mesure où il possède les pouvoirs de réparation équivalant à ceux de la CRT , l’arbitre de griefs est compétent pour entendre ces griefs.

« Le caractère impératif de la norme signifie plutôt que toute disposition conventionnelle incompatible avec l’interdiction du congédiement sans cause juste et suffisante d’un salarié justifiant de deux ans de service continu (article 124 L.n.t.) est réputée non écrite, ce qui modifie le contenu de la convention collective ».

« En d’autres termes, la loi restreint pour autant la liberté contractuelle des parties, en privant d’effet toute stipulation incompatible avec les normes d’ordre public qu’elles ont incluse dans l’entente ou en les obligeant à adopter des conditions de travail à tout le moins aussi avantageuses pour les salariés que celles prévue à la L.n.t.. ».

Commission scolaire Chomedey de Laval c. Dubé, [1997] R.J.Q. 1203 (C.A.)

Une salariée régie par une convention collective peut déposer une plainte en vertu de l’article 124 LNT lorsque la procédure de grief est inutile et sans objet en raison de certains droits de gérance relatifs à la constitution de la liste de rappel qui sont accordés à l’employeur dans cette convention collective. Par ailleurs, un recours fondé sur la Charte des droits et libertés de la personne ne peut non plus être considéré comme un recours équivalent.

Université McGill c. Ong, D.T.E. 2014T-198 (C.A.)

La procédure d’arbitrage prévue dans la convention ne constitue pas une autre procédure de réparation au sens de l’article 124 LNT en ce qu’elle ne confère pas une efficacité équivalente au recours sans frais offert devant la C.R.T.

Longpré c. Commission scolaire des Affluents, D.T.E. 2013T-35 (C.R.T.). Confirmé en révision judiciaire, D.T.E 2014T-196 (C.S.)

L’employeur soulève un moyen préliminaire à l’effet que la salariée bénéficie d’une procédure de réparation en vertu du Règlement déterminant certaines conditions de travail des cadres des commissions scolaires et du Comité de gestion de la taxe scolaire de l’Île de Montréal (CSDA) équivalant à un recours en vertu de l’article 124 LNT. Deux éléments se distinguent. Le comité d’appel ne peut obliger le CSDA à réintégrer la salariée dans son poste, c’est l’employeur qui détermine dans quel poste elle sera réintégrée. De même, ce comité ne peut ordonner le paiement de dommages moraux, punitifs ou autres ou rendre toute autre ordonnance appropriée contrairement aux pouvoirs dont dispose la C.R.T. en vertu de l’article 128 LNT.

La C.R.T. considère que les mesures de réparations accordées par ce règlement et du CSDA ne sont pas équivalentes à celles offertes au recours suivant l’article 124 LNT.

Morissette c. Pouliot Chevrolet Oldsmobile inc., D.T.E. 2002T-186 (C.T.)

Il n’y a pas identité de causes entre le recours fondé sur l’article 32 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP) et celui fondé sur l’article 124 LNT.

Giguère c. Cie Kenworth du Canada, division de Paccar du Canada ltée, [1990] R.J.Q. 2485 (C.A.)

Le recours fondé sur l’article 122 LNT n’équivaut pas à l’autre procédure de réparation prévue à l’article 124 LNT. Ces deux recours visent des buts différents et donnent lieu à des décisions qui n’ont rien de semblable. L’exercice du recours de l’article 122 LNT ne fait pas échec à l’ouverture du recours de l’article 124 LNT.

E. forme de plainte

Bélanger c. Future électronique inc., [2005] R.J.D.T. 1687 (C.R.T.)

La plaignante satisfait aux exigences de l’article 124 LNT en soumettant par écrit sa plainte par courriel par l’intermédiaire du site Internet de la Commission des normes du travail.

F. Réintégration

Blanchette c. Clinique Vivacité inc., 2017 QCTAT 4716

La plaignante ne veut pas être réintégrée, mais l’employeur est prêt à le faire. Le Tribunal conclut qu’il n’y a pas d’obstacle à la réintégration et qu’elle doit être ordonnée.

Bédard et Gaudet, 2018 QCTAT 1830

La réintégration de la plaignante à titre d’hygiéniste dans un petit cabinet de dentiste n’est ni réaliste ni envisageable. Dans les circonstances, le Tribunal conclut que la réintégration est effectivement impossible considérant la nature d’étroite collaboration qui doit exister, et le paiement d’une indemnité pour perte d’emploi est ordonné.